21 Novembre 2012
Cette semaine 46 avait pourtant bien démarré... elle s'est terminée hélas dans une grande tristesse. Notre ami Patrick Edlinger nous a définitivement lâchés ce vendredi 16 novembre 2012, parti pour de bon et vraiment trop tôt. Par Daniel LEON
Il n'avait que 52 ans...Il était le meilleur grimpeur de sa génération, sans doute le plus influent de l'histoire de la discipline. Faisant de l’escalade un art, il s'était joué de voies aux confins du possible. Insupportable ironie du sort, il est décédé des suites d’une banale chute dans l’escalier de sa maison à La Palud-sur-Verdon.
Né le 15 juin 1960 à Dax, il débute l’escalade à 8 ans avant de former une cordée célèbre avec Patrick Bérhault (1957-2004). Ensemble, à la fin des années 1970, ils se distinguent notamment lors d’hivernales engagées dans les massifs du Mont-Blanc et des Écrins. Mais Edlinger délaisse rapidement l’alpinisme en faveur de l’escalade. Adepte de méthodes d’entraînement pointues propres aux athlètes de haut niveau, il ouvre l’escalade au monde dans deux documentaires réalisés en 1982 par Jean-Paul Janssen : La vie au bout des doigts et Opéra Vertical.
Il gagne avec... élégance
Le grand public croit rêver face à ce personnage étonnant, éphèbe blond au corps sculpté suspendu d’une seule main et sans assurance au-dessus de parois vertigineuses parfois hautes de plusieurs centaines de mètres. Porteur d’un message dans lequel les termes liberté, art de vivre et respect de la nature reviennent comme des leitmotive, il ouvre des voies extrêmes et accède à la reconnaissance internationale.
Il participe même à des compétitions internationales dont on pourrait penser qu’elles ne correspondent pas à son état d’esprit. Mais Edlinger doit prouver qu’il est le meilleur partout. Alors il gagne. Et pas seulement. Il gagne avec élégance, avec cette gestuelle qui est sa marque et qui inspirera tant de grimpeurs.
En 1995, il survit miraculeusement après une grave chute dans les Calanques et met fin à sa carrière de grimpeur de haut niveau. La même année, au sein du groupe Glénat, il fonde Roc'n Wall, et jusqu'en 1999, date de parution du dernier numéro avant fusion avec Vertical, il œuvre au succès de ce titre devenu le magazine phare de l'escalade en France.
Un homme simple et attachant
Désormais installé à La Palud, il devient papa d’une petite fille en 2002, ouvre un gîte, continue d’écumer les falaises locales et s’adonne à sa deuxième passion, la pêche. Je n’oublierai jamais la façon dont il m’avait décrit, un beau jour de juin 2000 alors que nous fêtions chez lui ses 40 ans, un de ses « affûts » à la truite : « Celle-là, elle était énorme. Ça faisait un moment que j’avais repéré son poste, que je la taquinais. Elle passait, tu vois, elle repassait, mais rien à faire, elle ne mordait pas. Et puis, un jour, elle est venue en surface et elle a pris l’appât. Je l’ai ramenée petit à petit, elle avait l’hameçon juste au coin de la gueule. Alors, je crois qu’elle m’a regardé. Et puis, elle a donné juste comme un petit coup de tête, comme ça, tu vois, et elle s’est décrochée. Voilà, elle avait gagné... »
Aujourd’hui, les truites du Verdon sont bien les seules gagnantes.
Avec Jean-Michel Asselin, Patrick Edlinger venait de mettre la touche finale à sa biographie "Patrick Edlinger, Ma vie suspendue" qui paraîtra aux éditions Guérin le 24 janvier 2013.